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Article extrait du site de lESA :
http://www.esa.int/export/esaCP/SEMQ4SWA6QD_France_2.html
« Des membranes pour recycler leau »
6 février 2004
Le maintien en vie dun équipage humain pendant de longues durées à grande distance de la Terre nécessitera le recyclage des déchets, et notamment des eaux usées. A Montpellier, le GIE Techno-Membranes a développé une unité de retraitement des eaux qui sera testée en vraie grandeur sur la station de Concordia, dans lAntarctique.
A bord dun vaisseau spatial, leau est le consommable nécessaire au support vie dont la masse est la plus importante. « Par jour, un être humain consomme trois litres deau pour ses seuls besoins métaboliques », précise Christophe Lasseur, responsable des études de support-vie à lESA. « Sil se lave, il faut ajouter à cela 20 à 25 litres ». Sur des missions de longue durée, le ravitaillement en eau est donc un problème fondamental, qui devient critique si lon quitte lorbite basse. Pour pouvoir un jour préparer des missions vers lespace lointain, ou sur une autre planète, il va dabord falloir résoudre la question du recyclage de leau.
Les études menées par lESA ont permis de démontrer le grand potentiel de la technologie des membranes pour la purification des « eaux grises », cest-à-dire les eaux usées issues des activités de toilette et de lavage ainsi que de la condensation (par opposition aux « eaux jaunes » et aux « eaux noires », chargées en urine et en matières fécales).
A Montferrier-sur-Lèz, près de Montpellier, le GIE Techno-Membranes, spécialiste des technologies membranaires pour des applications environnementales, travaille depuis plus de dix ans avec lESA sur le sujet et vient dachever le développement dune unité de traitement des eaux pour une première campagne dessais en vraie grandeur dans la base polaire franco-italienne de Concordia, sur le plateau continental antarctique.
Accessible tout juste deux à trois mois par an et conçue dans un souci dimpact minimal sur lenvironnement quelle doit étudier, la station polaire de Concordia constitue un laboratoire exceptionnel pour les technologies de recyclage et plus généralement pour la plupart des systèmes de support-vie qui permettront de préparer des missions habitées dans lespace lointain, comme celles étudiées par lESA dans le cadre du programme Aurora.
Réalisée pour lInstitut Polaire Français Paul Emile Victor (IPEV) et le Programme Italien de Recherche en Antarctique (PNRA) en coopération avec lESA, cette unité de 1 500 kg traite leau avec un débit maximal de 300 litres par heure. La capacité journalière est de 2 400 à 2 800 litres, ce qui correspond aux eaux grises denviron 25 personnes (vaisselle, douches, hygiène, lessive, lavage des sols et eaux de cuisson). Lobjectif est datteindre un taux de recyclage de leau supérieur à 90% pour des applications dhygiène.
Membranes organiques et céramiques
Lunité comporte quatre niveaux de purification. Après élimination des éventuels grosses particules, leau circule dans un premier temps à travers une membrane organique dultrafiltration. Il sagit en fait dun faisceau de fibres creuses réalisées dans un matériau polymère poreux capable darrêter toutes les molécules de masse molaire supérieure à 100 000 g. « Lécoulement se fait tangentiellement, à l'intérieur des fibres, pour éviter la formation de dépôts » explique Jean-Christophe Lasserre, responsable des essais chez Techno-Membranes.
La deuxième phase fait appel à des membranes céramiques qui se présentent sous la forme de longs prismes hexagonaux percés de multiples canaux dans le sens de la longueur. Ce matériau permet une nano filtration en arrêtant toute molécule de masse molaire supérieure à 1 000 g ainsi que les ions multivalents (calcium, magnésium, aluminium, sulfates). La surface déchange atteint 15 m2 dans lunité dultrafiltration, puis 9 m2 en nano filtration.
Les deux dernières phases font appel à un autre procédé, losmose inverse, déjà utilisée pour le dessalement de leau de mer. Un premier étage se compose de trois membranes organiques se présentant sous la forme de modules spiralés pour une surface déchange totale de 240 m2. Le second étage ne comporte quune seule membrane de 80 m2 et fournit une eau pure, totalement déminéralisée.
Avant lAntarctique, la Lozère
Dans un premier temps, lunité sera mise à lessai pendant deux mois dans un environnement bien plus facile daccès que la station de Concordia : le Lycée Aquacole de La Canourgue, en Lozère.
« Avant de la transférer dans lAntarctique, où toute intervention technique sera impossible, nous devons nous assurer que tout fonctionne parfaitement », explique Jean-Christophe Lasserre. « Le lycée de la Canourgue, avec son internat, est représentatif du niveau dutilisation auquel lunité sera soumise à Concordia. »
Cette campagne préliminaire en conditions réelles permettra de suivre le comportement des membranes et en particulier de définir les cycles dentretien. « Il faut notamment éviter la formation dun film de matière organique sur la membrane dultrafiltration » note Jean-Christophe Lasserre. Les autres membranes devraient demander un entretien moins fréquent.
Lété prochain, lunité sera transférée vers lAustralie où elle attendra lété austral pour pouvoir être transportée à Concordia. A terme des systèmes de ce type pourraient trouver leur place sur une future station martienne.
Les technologies développées par Techno-Membranes pour lESA ne se limitent pas à des applications spatiales ou polaires. En partenariat avec le Programme de Transferts de Technologies de lESA, les solutions membranaires ont pu être appliquées ou étudiées pour des environnements bien moins hostiles, comme le recyclage de leau dans les avions gros porteurs ou le traitement des eaux pour des habitats très dispersés. »
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